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Tuesday, 20 December 2011

Soufre-douleur

C'est marrant de voir comment notre perception du soufre (ou plutôt des sulfites) a évolué ces dernières années. Quand j'ai commencé à bosser dans le vin, c'est à dire il y a peu ou prou 10 ans, on était en pleine vogue du "zéro soufre".  Des vignerons (en particulier en Beaujolais) ce sont faits les apôtres d'une viticulture libérée du carcan de l'utilisation du soufre et ont allègrement embouteillé des millésimes entiers ou des cuvées sans ajout de soufre.  Il y avait d'ailleurs de nombreux relais à Paris ou ailleurs de cette pratique, cavistes, sommeliers et autres journalistes  Avec mon boss à l'époque, on les appelait les "SS" (pour sans-soufre, mais avec la connotation fascisante pour bien exprimer combien ces personnes étaient intransigeantes).  

Je me souviens aussi de nombreuses personnes me disant qu'elles étaient hyper-sensibles au soufre, voire allergiques, et que de boire des vins "soufrés" leur donnait des maux de crâne pas possibles, des palpitations voire pire.  Il y a effectivement des personnes allergiques au soufre, mais dans ce cas le soufre est urticant, mais pas source de tous ces autres maux supposés.  J'ai l'impression qu'ils avaient tendance à somatiser un peu.  En attendant, je n'ai jamais tenté l'expérience de leur servir des vins avec des niveaux de soufre raisonnables et de leur dire qu'ils étaient sans soufre, pour voir comment ils réagiraient.  Comme l'epxérience sur les réactions des gens à la cafféine: il y a beaucoup de gens qui affirment qu'ils ont besoin de cafféine pour être bien réveillées.  Pourtant, si on remplace leur café habituel par du décaf à leur insu, ils ont l'impression d'être aussi réveillés.  Le tout c'est d'y croire!

Le problème du sans-soufre, c'est que cela rend le vin ultra-vulnérable: un changement de température trop brutal et c'est la panique: les bouteilles tournent rapidement, repartent en fermentation, voire pire.  Donc, le vin sans soufre, c'est très bien chez le vigneron, mais dès que ça sort de sa cave, plus rien n'est sûr.  Je me souviens de Kermit Lynch, le grand importateur Californien, me racontant qu'au début des expériences de Marcel Lapierre et compères sur les vins zéro soufre, il se retrouvait avec entre un quart et un tiers des bouteilles foutues à l'arrivée.  Il a donc été le premier à insister pour que ses vignerons mettent au moins un tout petit peu de soufre dans leurs vins pour les stabiliser.  

Car c'est là tout l'intérêt du soufre: de stabiliser le vin, d'empêcher des développements de levures ou bactéries néfastes.  Si il n'y a pas de date de péremption sur une bouteille de vin, elle peut facilement tourner si elle n'est pas protégée au minimum.  Le tout est donc d'utiliser le soufre avec parcimonie.  On voit très rarement aujourd'hui des vins qui sont super-soufrés (je parle des vins de qualité) et je ne connais pas de nez assez sensible pour détecter des niveaux faibles de soufre dans un vin.  Ce n'est pas une question de goût donc.  Plutôt une quesiton de principe, une sorte de principe de précaution, qui voudrait que le soufre soit mauvais pour l'organisme et qu'il faille l'éviter, en tout cas à fortes doses.  Soit, mais en attendant, aucun label, qu'il soit bio, biodynamique ou autre, n'interdit l'utilisation du soufre et aucun vigneron raisonnable ne refusera catégoriquement d'utiliser le soufre.  Autant dire que le soufre est une nécessité. 

Cela étant, bien entendu, le tout est d'en utiliser au bon moment et le moins possible.  Pour cela, je suis assez content qu'on soit revenus de l'époque des SS et autres moudjahidines du zéro soufre.

Wednesday, 2 November 2011

C'est quoi les vins "naturels"?


La dégustation d'hier (Cf. Lis Neris @ Alfa) m'a fait réfléchir au sujet des vins "naturels" voire "natures".  En effet, on entend de plus en plus de sommeliers, cavistes, journalistes et même simples consommateurs dire qu'ils préfèrent ou ne boivent que des vins "naturels".  Par opposition aux vins artificiels, j'imagine.  Mais arrêtons-nous deux petites minutes sur ce terme et ce qu'il implique.

Ces dernières années, il y a donc eu une espèce de prise de conscience collective, très dans l'air du temps, que les vins naturels sont meilleurs pour la nature, meilleurs pour vous et pourquoi pas meilleurs tout court.  Il y a bon nombre de jeunes amoureux de la nature qui se sont lancés dans la viticulture, rachetant ou plantant quelques hectares en Auvergne, Midi-Pyrennées ou Loire ou ailleurs, avec l'intention de faire un vin tout ce qu'il y a de plus naturel.  Ils sont faciles à repérer, ils ont souvent la barbe, sont un peu farfelus et les étiquettes de leurs bouteilles sont souvent très colorées et abstraites, avec des noms de cuvées en jeu de mots un peu (beaucoup) rébarbatifs.  Que n'a-t-on pas vu de Bulles-en-fête, Vin-o-naturel, The Naked wine ou autres?!  En discutant un peu avec ces jeunes vignerons, on se rend compte qu'ils ont des opinions assez prononcées sur ce que doit être la viticulture et comment il faut conduire son vignoble et faire son vin pour être vraiment "naturel".  Le pendant et porte-parole de cette nouvelle génération de vignerons, ce sont ces nouveaux cavistes ou bars à vins, le genre urbains branchés, jean slim, barbe et chemise à carreaux, qui vous font goûter l'oeil pétillant de joie ce vin d'un vigneron "nature", un mec vachement sympa, qui s'est lancé il y a à peine deux ans et qui fait déjà du vin naturel. Ah, oui, mais le vin est complètement bretté et il est reparti en fermentation dans la bouteille.  C'est pas grave, vous dis le caviste, qui ne sait même pas ce que ça veut dire, ce qui compte c'est la philosophie derrière, hein?  Ils essaient d'être le plus nature possible, alors on salue l'effort s'il vous plait!  Et puis, ce goût foxé crado, c'est parce que c'est nature, c'est comme ça la nature, ça sent pas forcément bon...  Bref, quand bien même j'ai de la sympathie pour ces néo-baba-cools, si le vin est dégueu et plein de défauts, je ne vois pas trop l'intérêt.  Les gens qui défendent ce type de vins sont au fond comme les trotskistes: ça ne marche pas du tout, mais l'idée est bonne, va pour l'idée!

Loin de moi l'envie de dire que ces vins ne peuvent pas être bons, mais si le résultat n'y est pas, mais alors pas du tout, pourquoi est-ce qu'on s'extasierait sur ces vins?  Etre naturel c'est très beau dans l'intention.  L'arsenic aussi c'est naturel, ce n'est pas pour autant que j'ai envie d'en boire...  Tout ça pour dire qu'en ayant de très belle intentions, ces vignerons en oublient souvent les bases.  Ils vont planter des vignes et les conduire en biodynamie dès le greffon sans aucune expérience préalable, alors que cela est plus que risqué.  Et surtout, pouvoir conduire son vignoble sans utiliser de produits chimiques, cela demande non seulement beaucoup d'expérience, d'abnégation, de savoir-faire, de timing, d'observation mais aussi une attention et un travail sans relâche.  Parce que quand on n'utilise pas de produits chimiques, on laisse le vignoble à la portée de toutes les bactéries, de tous les virus, insectes et autres champignons possibles et la vigne ne peut pas se défendre.  Et ici, il y a souvent une confusion énorme: être "nature" reviendrait à ne rien faire, ou plutôt à laisser faire la nature.  C'est marrant, parce que si le trotskiste est dirigiste quand il s'agit de société humaine, il est libéral, voire ultra-libéral pour ce qui concerne la nature... Laissez-faire, c'est ce qu'il y a de mieux!

Cependant, le but d'une viticulture "naturelle" (allez, j'en ai marre de ce terme, on utilisera désormais "viticulture respectueuse de la vie", ce qui est un peu long, je vous l'accorde) n'est pas de laisser les vignes se démerder, mais de les aider à se défendre contre toutes les attques en créant un équilibre "naturel", dans lequel les bactéries ou champignons ou insectes maléfiques sont "naturellement" contrées par d'autres organismes.  Et ça, ça ne s'improvise pas.  Je connais des vignerons, biodynamistes de très longue date, qui vont traiter leurs vignes avec du purain d'ortie entre deux heures et quatres heures du matin une nuit donnée, parce que c'est le meilleur moment pour avoir un rendement maximum de l'intrant: en gros, si on traite bien, on peut traiter peu.  La nature fera le reste, naturellement.  Mais, en fait, il n'y a rien de naturel ici: si le vigneron intervient le moins possible, il intervient quand même, et ce de façon tout à fait décisive.  C'est la main de l'homme qui permet au vignoble de vivre en équilibre, ça ne se fait pas tout seul du tout. Ensuite, aller traiter ses vignes au beau milieu de la nuit, il faut le vouloir un peu, quand même!  Je ne dis pas que ces jeunes vignerons néo-babas sont fainéants, je dis simplement qu'ils sont mal ou pas du tout conseillés et qu'il est tout simplement impossible de savoir faire un vin naturel bon tout de suite et tout seul.

Après, bien sûr, personne n'est d'accord sur ce qu'est un vin naturel, en termes de ce qui est admis ou pas: zéro produit chimique dans les vignes semble être accepté par tous, mais qu'en est-il des levures?  Je renvoie à l'article d'hier sur Lis Neris.  On peut faire du vin "naturel" en utilisant des levures sélectionnées?  Pour moi la définition la plus simple d'un vin "naturel", c'est un vignoble dont le sol est vivant et qui est fait avec des levures endogènes.  Sans aucune exception possible.  Il est simple aussi d'expliquer pourquoi ces vins sont meilleurs et parlent plus clairement le langage de leur lieu de production: les racines d'une vigne sont incapables d'ingérer les minéraux contenus dans le sol.  Elles ont pour cela besoin de toutes sortes de micro-organismes, bactéries etc. qui "pré-digèrent" les minéraux, qu'elles pourront ensuite absorber.  Donc si le sol n'est pas vivant, la vigne ne peut pas donner de vin "minéral".  Ensuite, les levures qui nous entourent partout, quand elles vivent en symbiose avec le territoire (vignoble), sont les seules à même de donner au vin le goût de ce même territoire. (Il faut vraiment que je fasse un post sur les levures, on va y venir...) Voilà, ce n'est pas plus compliqué que ça.  C'est pour cela que tous les vins bons sont vivants et qu'il ne peut pas en être autrement.  Cependant, arriver à faire du bon vin en respectant ces principes, c'est quasi mission impossible.  Alors, quand un vigneron y arrive et y arrive régulièrement, pas juste une année où tous les éléments météorologiques sont de leur côté, et bien ça, pour moi, c'est miraculeux et beau.

Bon, donc, désolé pour tous les baba-cools, je ne veux pas vous décourager d'essayer de faire du bon vin, mais ce n'est pas parce que c'est "nature" que c'est bon, pour ça il faut beaucoup plus que des bonnes intentions.

Donc, on récapépète, faire du vin "naturel" c'est bien, mais c'est surtout très compliqué.  Je préfère parler de vin vivant, plutôt que de vin naturel, parce que naturel ça veut dire tout et n'importe quoi.

Monday, 24 October 2011

Clone wars

Petite réunion / dégustation avec un producteur californien ce matin.  Ca m'a rappelé des bons souvenirs. Surtout un concept qui m'avait marqué aux US, celui des "clones".  On parlait il y a quelques années beaucoup de clones aux Etats-Unis, surtout pour le pinot noir, les "Dijon Clones", les "Pommard Clones", le "667" ou le "777".  Si les Américains parlent ouvertement des clones qu'ils utilisent, on en parle peu en France.  Cela est très intéressant si l'on considère le point suivant: qu'est-ce qu'un cépage?  Qu'est-ce qui fait génétiquement un cépage?  Le Pinot Noir est-il identique génétiquement parlant partout sur terre?    

La raison du clonage ou de la sélection clonale est simple et née de la crise du phylloxéra.  En effet, pour palier les maladies récurrentes de la vigne, on a créé des techniques de sélection, d'observation puis de reproduction des plants les plus vigoureux.  Une plante-mère donne ainsi des plantes (clones) identiques, qu'on plantera après quelques générations dans un vignoble.  Ainsi, en plantant des clones plus résistants (ainsi qu'en améliorant la conduite des vignobles) on pouvait éviter les crises de pénurie.  Cependant, les progrès des techniques agronomiques et les engrais et autres intrants chimiques introduits après la Seconde Guerre Mondiale ont tellement bien marché qu'aujourd'hui le problème est plutôt l'inverse: on est souvent dans des cas de surproduction.  En effet, la plupart des clones classiques ont été créés pour être vigoureux (résistants aux maladies) et productifs.  C'est pourquoi les meilleurs vignerons français préfèrent  procéder par sélection massale plutôt que clonale, ce qui permet d'avoir des vignes "sur-mesure" et adaptées à ses besoins.  La sélection massale, c'est lorsque un vigneron sélectionne les meilleures de ses vignes pour les reproduire et les replanter.  L'idée étant qu'on utilise des plants qui ont déjà prouvé qu'ils étaient adaptés au contexte des vignobles concernés: climat, hygrométrie, sols etc...  Cela permet de maintenir une certaine diversité génétique.  En revanche, les domaines de très grande taille, pour des questions de régularité, préfèrent utiliser des clones agréés, souvent au détriment de la diversité génétique de leurs vignes.  On accuse souvent les clones de rendre les produits trop standards.

Aux Etats-Unis, comme ailleurs dans les vignobles du Nouveau Monde, et comme le nom l'indique, la viticulture est née (enfin pas vraiment, mais disons "a connu son essor") avec les techniques agronomiques modernes.  Ils utilisent donc allègrement des clones développés pour leur contexte.  En Californie, l'université UC Davis est la spécialiste de toutes les questions de viticulture et en particulier des clones et a développé la plupart des clones que l'on utilise là-bas.  A tel point d'ailleurs que les Américains ont tendance à parler d'un clone particulier comme ayant des caractéristiques tellement développées que c'est presque un cépage à lui tout seul.  En effet, ce qu'on appelle Pinot Noir en France n'a rien à voir avec ce que l'on fait aux US.  Et les Américains peuvent dire autant qu'ils veulent qu'ils essaient de faire du Bourgogne rouge en Oregon ou Sonoma, ils ne pourront jamais le faire, car leurs clones n'ont rien à voir avec les clones français.  Je constate cependant, après ma réunion de ce matin, que le discours a changé un peu par rapport à il y a 5 ans, mon ami ne parle plus de "777 Clone" mais de "Proprietary clones", entendre "sélection massale".  Les vignerons américains chercheraient-ils donc maintenant à se démarquer et à rendre leur production plus unique?  Tant mieux, cette idée fait son chemin, c'est bien pour tout le monde.

Bref, désolé si je fais le méga-geek, mais la viticulture est éminemment complexe et il y a beaucoup d'aspects qui aboutissent au produit qui finit en bouteille, je me suis dit que je tenterais d'en expliquer un des aspects, et non des moindres...

Thursday, 20 October 2011

C'est quoi un rendement à l'hectare?

La question du rendement à l'hectare est un des points sensibles de la viticulture moderne. Il est évident et on a prouvé empiriquement depuis très longtemps qu'un rendement faible donne plus de concentration au raisin et donc au vin (enfin, jusqu'à un certin niveau: ce n'est pas parce qu'on aura des rendements de 2 HL/Ha qu'on va produire le meilleur vin du monde...).  Malheureusement, on entend un peu tout et n'importe quoi en la  matière.  La base pour calculer le rendement à l'hectare est: hectolitres par hectare de vin produit.  En gros, on prend la quantité de vin produite pour une parcelle donnée et on divise par le nombre d'hectares de ladite parcelle.  L'INAO fixe des seuils à ne pas dépasser pour chaque appellation.  Cependant, aujourd'hui, la plupart des bons vignerons vous diront que ces seuils sont souvent excessifs.  Et en plus, des petits malins vous diront qu'ils font des faibles rendements, gages de qualité et d'une certaine abnégation (ben oui, on produit moins, donc on vend moins, juste parce qu'on veut vous faire des vins meilleurs), alors que la réalité est beaucoup plus complexe.  Je m'explique:

- d'une part, la densité à l'hectare joue beaucoup.  Typiquement, si vous plantez 10 000 pieds de vignes à l'hectare (une vigne tous les mètres, un mètre entre chaque rang de vignes) et que vous faites un rendement de 40HL/Ha, chaque vigne produit deux fois moins de raisin que si vous en avez 5 000 par hectare.  L'INAO fixe des densités de vignes minimales dans les décrets d'appellation, mais ces densités sont généralement faibles (4 à 5 000 pieds par hectare).   Cela est important si on considère qu'une vigne a besoin de "souffrir" pour donner le meilleur raisin.  Pour clarifier, sachez que la vigne est la plante la plus vigoureuse au monde.  Si vous lui donner du soleil et de l'eau, elle peut pousser (en feuillage) presque à l'infini.  Il exite d'ailleurs en Amazonie des pieds de vignes couvrant plusieurs hectares (je parle bien d'une seule vigne) et étouffant toute la végétation alentour.  Une vigne ne produit du raisin (son "organe reproducteur") que si elle se sent menacée.  Dans le cas où une vigne souffre, toute cette vigueur extraordinaire ira donc dans la production de raisin.  Mais pour cela, il faut vraiment mettre la vigne dans les pires conditions possibles: des sols pauvres, peu de pluie, aucun intrant, une grande concurrence entre vignes.  La vigne, elle, se débrouille très bien, tant qu'il ne fait pas trop froid trop longtemps.  Bref, tout ça pour dire que la densité à l'hectare va jouer sur la compétition entre les vignes pour leurs maigres ressources: plus les vignes sont denses, plus elles sont en "danger" de manque de ressources, plus elles se "battent" pour produire du raisin.

- ensuite, vous avez peut-être entendu parler de "vendanges en vert".  Cela consiste à débarrasser les vignes de grappes de raisins non mûries un mois ou deux avant la vendange pour "alléger" les vignes.  C'est une pratique courante dans certaines régions, mais elle mérite explication.  Au-delà de la densité en vignes d'un hectare, il compte de savoir combien produit chaque vigne.  Cela se mesure par le nombre des grappes de raisins (et au moment de la taille de la vigne, par le nombre d'yeux "francs", ou futurs bourgeons) par vigne.  Ce nombre se décide au moment de la taille hivernale: plus on laisse de branches et plus elles sont longues, plus il y aura d'yeux et donc de raisin par vigne au final.  Vous entendrez des vignerons vous dire que la vendange en vert permet de choisir les meilleures grappes pour que la vigne les favorise lors de leur maturation finale.  Comme si une vigne était capable de reporter l'énergie vitale qu'elle utilise pour produire 12 grappes sur 6 grappes restant après vendange en vert... En réalité, cela n'a jamais été prouvé et il est assez improbable que la concentration du raisin augmente avec une vendange en vert.  Comme j'ai l'esprit mal tourné, je dirais volontiers que ceux qui pratiquent ces vendanges en vert, sont a) des fainéants qui conduisent mal leurs vignes, laissant trop d'yeux et qui sont obliger de retirer des grappes pour éviter de dépasser les rendements max de l'appellation ou b) des gens qui ont peur de perdre du raisin à cause de la grêle ou autre gel tardif et qui font exprès de laisser trop d'yeux pour arriver à un rendement "acceptable": soit juste en dessous du max soit à un rendement qui fait genre on produit de la qualité.  

- enfin, les vendangeurs procèdent à des tris à la vigne, laissant tomber plus ou moins de raisin selon les exigences du vigneron et les vignerons les plus exigeants ont même des tables de tri qu'ils apportent avec eux dans le vignoble pour trier le raisin vendangé.  Cela réduit le rendement final et est plutôt souhaitable.

On voit bien que la notion de rendement est plus compliquée qu'une équation quantité de raisin / nombre d'hectares.  La prochaine fois qu'un vigneron ou représentant vous parlera de ses rendements bas, vous saurez leur poser les bonnes questions: oui mais, quelle est la densité de plantation des vignes?  Et procédez-vous à des vendanges en vert?  Au final, la seule façon de juger des pratiques d'un vigneron, c'est encore d'aller faire un tour dans ses vignes.  Les plus avertis pourront aller dès la fin de la taille, sinon, après la floraison ça marche très bien.  Si vous voyez que les vignes ont plusieurs douzaines d'yeux ou de "grappes", et que le vigneron vous dit qu'il fait 14 HL/Ha, c'est certainement qu'il y a  un loup quelque part...

La folie des verres

Ca me fait bien marrer de voir à quel point les verres pulullent.  On se retrouve des fois à table au restaurant avec 5 verres différents.  Merde, celui-là était le verre à eau, la honte! Il y a pratiquement un verre pour chaque type (supposé) de vin.  J'attends avec impatience la sortie du verre spécial "Verre Bourgueil jeune, mais pas trop léger, ayant entre trois et cinq ans de vieillissement".  Il manque cruellement à ma collec' celui-là.  Je soupçonne les verriers d'en faire un peu trop pour nous faire acheter tout et n'importe quoi.  Surtout, j'adore quand ils font des présentations du genre: "On a réuni tous les Meilleurs Sommeliers du Monde des 20 dernières années, Robert Parker, Thierry Desseauve, Jancis Robinson et Hugh Johnson et le président de l'INAO pour une dégustation à l'aveugle exceptionnelle et ils sont tous tombés d'accord que ce verre - le "Bourgogne blanc, plutôt Muersault que Chassagne, sans remuage, millésime frais et sec" - était le verre idéal pour boire un Meursault Perrières 2007 des Comtes Lafon."  C'est exactement ce qui va me décider à en acheter quelques  douzaines...

Ensuite, la multiplication des verres crée des situations assez embarrassantes pour notre cher stagiaire sommelier qui se plante de verre et se fait engueuler par le sommelier en charge. Les clients s'en foutent et n'avaient même pas remarqué, mais c'est pas ça le problème, c'est que c'est HYPER-important d'avoir 40 verres différents sur une table.

J'adore tout particulièrement les verres "techniques", qui sont complètement pas pratiques, ont des noms inprononçables et des designs anguleux, il n'y a rien qui me fasse moins envie de boire du vin...

Bref, si comme moi vous trouvez cela absurde, voici ce que je recommande: n'avoir qu'un seul verre pour tous les vins.  Et oui, c'est possible.  Le premier avantage c'est que la dégustation étant un exercice où il y a énormément d'aléas, c'est bien de pouvoir se dire que n'est pas parce qu'on a un verre différent que le vin goûte différemment.  Ensuite, au moins comme ça, vous n'aurez pas à décider quel verre il faut pour quel vin.  Bien évidemment, le poids, le design, le matériau et l'équilibre d'un verre sont aussi importants: un verre peut être très beau, si il n'est pas fonctionnel, ça ne sert à rien.

Ensuite, en termes d'utilisation, je conseille de toujours laver les verres à la main et de les sécher aussitôt avec un torchon propre (les pros le savent déjà, désolé pour eux de le répéter).  Avec les laves-vaisselle, l'eau calcaire et des cycles "séchage" de durée inconnue, ça peut craindre après un certain temps. Ensuite, à la main on a quand même moins de chances de casser les verres, en tout cas, après une petite formation au séchage et un peu de pratique. Enfin, une fois propres et secs, stocker les verres debout sur une étagère ouverte.  Surtout pas dans un palacard ou un buffet fermé.

Voilà en gros ce que j'ai à dire.  Pour ma part, le verre idéal de dégustation c'est ce verre-là:

Monday, 17 October 2011

Le vin, c'est comme la bière.

Ah la capsule d'une bouteille de vin! Vous avez peut-être entendu parler de ou même eu entre les mains une très vieille bouteille de Bordeaux ou de Bourgogne avec une capsule en ferraille épaisse, genre rouleau d'étain épais.  Ces capsules-là étaient un peu l'équivalent de la ceinture de chasteté médiévale. Elles ont été progressivement abandonnées pour des alternatives moins couteuses.  Il y a aussi eu des bruits qui disaient que ces capsules contenaient du plomb et pouvaient donc causer le saturnisme.  On imagine bien la quantité de vin avec la capsule mal coupée qu'il fallait boire pour en être atteint de cette façon...

Avec la généralisation de la bouteille et surtout de la taxation de l'alcool et des appellations, on a créé ce qui s'appelle la "capsule congé", qui certifie que les droits ont été payés sur ledit vin.  En France, ça ressemble à une petite pastille ronde collée sur le dessus de la bouteille, avec une Marianne et un code couleur selon le type d'appellation: le vert, c'est une AOC, le bleu c'est un VDP (il me semble en tout cas, désolé si je me suis planté, là où je suis, je ne peux pas exactement aller à la supérette vérifier).  Bref tout ça pour dire qu'aujourd'hui, le seul intérêt de la capsule d'une bouteille de vin, c'est de porter la capsule congé.   Chaque pays a sa façon de faire, en Italie, par exemple, il y a un petit bandeau de papier recouvrant le dessus de la bouteille et qui porte les mentions officielles.  Bref, c'est assez pittoresque et très utilitariste.

Bien entendu, de peur que vous soyez atteint de saturnisme (on ne sait jamais!), on vous a bien appris à couper la capsule comme ça:

Surtout pas comme ça:

Tout ça est très beau et ça me fait toujours bien marrer de voir un pauvre stagiaire sommelier tout tremblotant qui lutte pour couper proprement sa capsule.  En attendant, je trouve les capsules assez moches et inutiles (une fois que le vin a été acheté et les droits acquittés, s'entend).  La plupart du temps, les capsules n'ont aucun rapport en termes de design ou de code couleur avec le reste de la bouteille ou l'étiquette du vin.  Donc, il me semble plus approprié de retirer carrément la capsule.  Ben oui! Euréka! Comme ça, on ne risque pas de couper la capsule de travers, ni d'attraper le saturnisme, ni d'avoir une capsule toute moche qui ne sert à rien.

Comme quoi, le vin c'est comme la bière, ça se décapsule.